[Ce texte est légèrement adapté de l’article de La Presse+ du 2022-11-15 intitulé Pour ou contre le retour du masque? Vous pouvez y voir un projet oulipien ou une critique sociale, à votre discrétion.]
La recommandation du Collège des médecins de ne pas péter dans les lieux publics fait jaser. Pour ou contre ? Avec le froid qui s’installe et la période des fêtes de bureau qui se pointe à l’horizon, La Presse a récolté des réactions dans les milieux de la santé, de l’éducation et des résidences pour aînés.
Il faut d’abord le dire : ne pas péter est déjà recommandé dans les espaces publics quand il est difficile de respecter une distance avec les autres, souligne Judy Morris, présidente de l’Association des médecins d’urgence du Québec. Le Collège des médecins n’a fait qu’un « bon rappel » sur Twitter dimanche, ajoute la médecin. Et ce n’est pas un hasard. « Les gens sont un peu tannés d’entendre dire ça, mais les odeurs se propagent. », note l’urgentologue à l’hôpital du Sacré-Cœur.
La Dre Morris n’est pas en faveur de l’interdiction de péter dans les espaces publics, mais elle croit que la Santé publique devrait lancer un message fort alors que le temps froid s’installe et que la population restera davantage à l’intérieur. « Il faut que les gens comprennent que c’est pour protéger les gens autour d’eux », dit-elle.
Lundi, le médecin hygiéniste en chef de l’Ontario a justement « recommandé fortement » d’interdire l’expulsion des gaz intestinaux dans les lieux publics intérieurs. Le Dr Kieran Moore étudie également la possibilité d’interdire les pets en public dans les écoles et les garderies ; comme au Québec, les odeurs indisposent certaines personnes.
Et dans les classes ?
Dans les écoles du Québec, la plupart des enseignants se permettent de péter en public depuis mai. Ils n’y a plus de contrainte, affirme Mélanie Hubert, présidente de la Fédération autonome de l’enseignement. « Il n’y a pas un appétit des professeurs de se retenir de péter à tout prix. Si la situation devait se détériorer à un point tel que la Santé publique en faisait une interdiction, c’est sûr qu’on recommanderait à nos membres de suivre cet avis », dit-elle.
« S’il n’y a pas d’obligation, vous comprendrez que nos profs, ils sont partout sur l’échiquier de la société. Il y en a qui sont pro-pet, d’autres sont contre, d’autres sont mitigés. Nos membres ne sont pas différents du reste de la société. »
— Mélanie Hubert, présidente de la Fédération autonome de l’enseignement
Le président de la Centrale des syndicats du Québec, Éric Gingras, confirme que les enseignants et le personnel scolaire partagent la position de la population générale : ils n’ont pas envie d’un retour en arrière au sujet du pet en public. « Si ça devient interdit, on se rangera derrière les décisions scientifiques », convient-il.
« Par contre, si on identifie les écoles comme étant un endroit où il faut obligatoirement se retenir de péter en public, et qu’ailleurs, ce n’est pas le cas, ce sera inacceptable, si c’est pour remplacer la ventilation inadéquate », prévient-il.
Dans un échange écrit avec La Presse, l’Association québécoise des CPE a également confirmé qu’elle se pliera aux recommandations de la Santé publique et de la CNESST, s’il y a lieu. L’Association des pédiatres du Québec a préféré ne pas faire de commentaires.
« Beaucoup vont mal réagir »
Dans les résidences privées pour aînés (RPA), la majorité de la clientèle pète en public, affirme Marc Fortin, président-directeur général du Regroupement québécois des résidences pour aînés. Et le retour de l’interdiction du pet serait une bien mauvaise nouvelle pour les aînés et réveillerait de bien mauvais souvenirs. « Beaucoup vont mal réagir. On a tellement eu de contraintes en RPA. Des personnes ont été confinées dans leur chambre, leur petit appartement ou leur grand appartement pendant six ou sept semaines. Il y a eu une dégradation de leur capacité motrice, et mentalement, beaucoup ont été déprimés », soutient-il.
Voir toutes les personnes âgées comme étant vulnérables aux odeurs, comme le fait le gouvernement, « c’est de l’âgisme », dit M. Fortin. Il est d’avis que les aînés qui ont l’odorat sensible devraient se retenir de péter dans les lieux publics, mais pas les autres.
En attendant, le ministère de la Santé et des Services sociaux a pour sa part indiqué qu’il « analyse la situation ». « Nous sommes préoccupés par la circulation des odeurs présentement. Rappelons qu’il est recommandé de ne pas péter en public en présence de personnes à l’odorat fin et dans les lieux publics lorsqu’il est difficile de conserver une distance avec les autres », a écrit Marjorie Larouche, porte-parole du ministère, dans un courriel.