Voilà le merle d’Amérique qui chasse les vers et les insectes terrestres sur le terrain. Regardez-le faire sa tournée, la tête en l’air ; il avance un petit coup en sautillant, s’arrête, pique son bec dans le sol, continue son manège. Sa technique semble aléatoire — tel le pêcheur qui lance sa ligne dans un lac au petit bonheur —, mais les résultats sont pourtant probants. Observez le merle qui déambule au hasard dans la pelouse, qui picosse et — clac ! — qui vous surprend en cueillant un ver. Le voilà qui l’arrache de terre en l’étirant comme un élastique. Sa proie attrapée, vous vous imaginez que le merle filera vers son nid pour y nourrir sa progéniture affamée, mais que nenni : le voilà, un cadavre de lombric pendouillant en travers du bec, qui continue à ratisser le terrain, le nez en l’air, le port altier, en gros fier pet.
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Lors d’une sortie récente de course à pied, j’ai pu observer à travers les brumes de ma vue sans verres correcteurs un oiseau de taille moyenne au dos gris foncé, au bec pointu et au ventre gris pâle ou grège. Perché sur une branche basse, il se tenait à quelques pas de moi. Tentant de mémoriser ses principales caractéristiques morphologiques, je l’ai fixé un long moment en plissant les yeux jusqu’à ce qu’il ne décampe. De retour à la maison, j’ai consulté mes guides d’identification et j’ai pu déterminer hors de tout doute que cet oiseau était un moucherolle à côtés olive, bien qu’il eût pu s’agir d’un pioui de l’Est, voire d’un tyran tritri. Je m’en suis voulu de ne pas avoir réussi à entendre son chant, de ne pas avoir pu l’interroger sur ses habitudes de vie.
Voilà en gros comment je pratique l’ornithologie.