22 mars 2020

Les mains gercées (1)

[Depuis le 12 mars, je publie sporadiquement des quatrains dans mon compte Twitter @nanopoesie pour témoigner de mes impressions de la pandémie du coronavirus SARS-CoV-2. L’état d’urgence sanitaire a été déclaré au Québec le 13 mars et depuis cette date, je vis en réclusion avec ma blondeÀ la suggestion de Bertrand Laverdure, je me suis mis à répertorier ces textes sous le mot-clic #covidPoème de façon à les joindre à un flux poétique collaboratif dans Twitter.

J’ai décidé de structurer mon projet. Voici le modus operandi. Je publie d’abord des quatrains dans mon compte Twitter @nanopoesie. De temps à autre, je fais une sélection et un assemblage que je retravaille et que je publie dans mon blogue dans la catégorie Les main gercées. Jespère donc publier ici un nouveau chapitre périodiquement, jusqu’à épuisement des stocks.]



(Source: Wikipedia)





Tu as éternué
À la station Pie-IX
Mais c’est à Snowdon que j’ai attrapé
La COVID-19


*


Ressens-tu le vertige
Quand tu montes
La pente abrupte
De la courbe exponentielle ?

Je me noie dans cette mer d’information
Je ne sais plus au juste s’il faut
Aplanir ou aplatir la courbe
Pour me calmer, j’écris ce poème


*


Mes acouphènes couvrent le bruit incessant
De l’Internet illimité
La nervosité gagne les tranchées
J’ai les mains en sang et le moral gercé

Je respire par le coude
C’est plus prudent
Ma bulle continue de gonfler
J’attends et j’incube


*


Une minute
Chérie
Je me lave les mains
Et je viens me coucher


*


Les balles perdues sifflent au-dessus de ma tête
Pas de casque, pas de masque
Je chante sur mon balcon une sérénade
Pour les journalistes esseulés

Le périscope est encore en panne
Je vais devoir faire une sortie
Je donne mon corps à la science
Des probabilités

L’homme est un loup pour l’homme
Nous rampons jusqu’au supermarché
À travers un champ de mauvaises mines
Les snipers toussent

Je suis en mission, mais j’ai oublié les codes secrets
Dans la file, je mesure mentalement l’écart d’un mètre
On me demande si j’ai la carte du magasin
Je réponds entre les dents : « Les carottes sont cuites »


*


J’examine la courbe à la recherche d’un signe
Sur les réseaux, tous insistent pour me dire à quel point
Leurs occupations sont intéressantes et sophistiquées
Pendant que je me tripote la face machinalement



*
*   *