Les services de renseignements n’avaient pas eu besoin de planter des micros chez moi, je m’en étais chargé; l’attrait de pouvoir allumer et éteindre les lumières en leur en donnant l’ordre à haute voix avait été trop fort. Ils n’avaient pas eu à installer un appareil de géolocalisation clandestin dans ma voiture, je portais un tel dispositif sur moi en permanence de mon propre gré. Pourquoi auraient-ils pris la peine de mettre ma ligne téléphonique sur écoute quand ils pouvaient intercepter à loisir toutes mes communications personnelles dans le confort de leurs bureaux? Il était loin l’âge d’or des agents secrets qui voyageaient de par le monde, conduisaient de rutilantes voitures de course et usaient de leurs charmes pour draguer leur cible tout en buvant du champagne millésimé. Comme avant eux les horlogers, les installateurs d’antennes VHF et les chauffeurs de taxi, les espions avaient vu leur métier devenir obsolète avec les avancées de la technologie, mais aussi parce que les citoyens, bons ou méchants, avaient renoncé à la discrétion, à leur droit de garder le secret sur leur existence. Nous vivions tous comme un livre ouvert et je ne faisais pas exception. Comme tout le monde, j’étais un suspect consentant et je faisais l’objet d’une surveillance constante.