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La sentence
C’est la journée mondiale des condamnés
C’est la journée internationale de l’inéluctabilité de la mort
Et du temps qui vers la fin
Fait un petit sprint
Tu te réveilles un matin
Tu as rendez-vous chez le docteur
Il t’ausculte, te scrute les lignes de la main, te tire aux cartes
Et t’annonce ta mort imminente
Il t’apprend, comme ça, que tu ne verras probablement plus le printemps
Que tu n’auras sans doute pas d’autre anniversaire
Qu’il ne reste que trois pages au roman
Ce n’est pas un pronostic, c’est une sentence
Je t’imagine poser un tas de questions
En langage médical
Tu veux savoir, tu veux comprendre
Rester en contrôle de la situation
La consultation terminée, je suppose que tu retournes chez toi
Il faut que tu vaques, il faut que tu soupes
Il faut que tu continues à vivre
En attendant
Je suppose que tu pleures
En n’écoutant pas les nouvelles de six heures qui jouent à la télé
Oui
Je suppose que tu pleures
Ce sont les heures fatidiques
Qu’on passe notre vie à redouter
Sisyphe s’épuise
C’est toujours la pierre qui l’emporte
Ce sont les heures dramatiques
Celles où, livré au Minotaure
Tu te perds
Dans le dédale de la condition humaine
Ce sont les heures vides
Que tu passes à ratisser le web
Que tu passes à prier Dieu
À la recherche de réponses
Je ne t’ai pas appelé depuis des jours
Autant dire dix ans
La preuve en est faite
Je ne suis qu’un maudit sans-cœur
Je ne sais pas quoi dire
Il faut écouter, dit-on
Mais je ne sais pas quoi dire
Les banalités, c’est mieux que rien
De l’autre bord du diagnostic
Le silence gronde
Il est minuit moins rien
À l’horloge de l’Apocalypse
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