29 décembre 2018

Moins zéro




C’est de la neige, du grésil ou de la bruine ? Pour m’aider à trancher, je jette un œil au thermomètre : il affiche moins zéro. Je ne suis pas plus avancé. À bien y regarder, il y a là-dedans de la neige parce que ça volète un peu en tombant. C’est un fait avéré : il n’y a plus de saison. Toute la pluie tombée hier et cette nuit a démoli le semblant d’hiver qu’on avait encore. Ce matin, c’est la glace, ce sont les bancs de neige ratatinés et souillés, c’est la rue revenue à l’asphalte. Les cèdres dégoulinants semblent se demander où tout ça s’en va.

Avant-hier encore, la montagne portait une tuque blanche et rentrait la tête dans ses épaules tellement il faisait froid. Un froid normal, cependant, un froid de saison, dans lequel je suis allé courir en fin d’après-midi. Je suis sagement resté dans l’accotement de ce chemin qui porte le nom d’un poète, le corps et le visage sporadiquement fouettés par la bourrasque produite par les pick-ups qui roulent trop vite, les pick-ups si nombreux, si banals, les picks-ups assoiffés qui avalent les kilomètres en vrombissant. Je suis revenu sur mes pas, la brunante aux trousses.

Il fait toujours moins zéro au thermomètre. Cette neige est si fine qu’on la voit à peine. Elle peut s’égrener tant qu’elle veut, ça ne changera pas grand-chose au décor morne. C’est une journée moche, une journée parfaite pour lire. Le nez dans un livre, on se fout de la météo. Le nez dans un livre, il n’y a plus de saison.