Pas encore décembre et c’est déjà franchement l’hiver. Il y a ça d’épais de neige. Des bancs de neige ont même commencé à pousser sur le bord du chemin. Il semble que l’automne a lancé la serviette (ou le blanc linceul), qu’il a callé (ou câllé) malade, qu’il est retourné dans son trou avec la marmotte. Meilleure chance l’année prochaine. Il fait moins six, ce matin. Une madame passe. Elle promène son chien. Un peu plus tard, un monsieur passe. Il promène son chien aussi. Sinon, c’est mort. Avec la neige réapparaissent les pistes de chevreuil sur le terrain. Je suspecte que la région est hantée par des hardes de cerfs fantômes : tout l’hiver, on voit leurs traces, mais on ne les aperçoit jamais. Il paraît que les cerfs fantômes mangent les branches basses des cèdres. Ils sèment sur le bord des routes des crottes pourtant bien réelles. Une grosse voiture passe, une de ces autos qui ressemblent à un énorme ballon de football métallique roulant. Une autre auto passe. Puis une autre. Presque neuf heures, ça s’active. La grande question qui me turlupine : dans quel ordre ferai-je les corvées du samedi ? Un coureur passe, nue tête, nues mains : ah, les jeunes ! Je me surprends à me faire cette remarque. À mon âge, me suis-je déjà transformé en un vieux haïssable qui écornifle le voisinage par sa fenêtre ?