Je dois dire que la principale conséquence de «Un balado/une baladodiffusion» est que j'ai recommencé à dire tout le temps «podcast».
— Christiane Campagna (@Christiane_MTL) 16 août 2018
[Encore une réunion à l’Office québécois de la langue française.]
— Aujourd’hui, nous nous penchons sur le cas de baladodiffusion. Ce mot est maintenant entré dans l’usage, en particulier dans les médias. Nos antennes notent cependant que les gens ont tendance à abréger ce mot en balado.
— Ce phénomène de troncation ne surprend guère étant donné que baladodiffusion fait six syllabes.
— En effet. Je propose donc que nous acceptions balado comme synonyme de baladodiffusion.
— Euh, veuillez excuser mon ignorance, mais pouvez-vous me rappeler ce qu’est au juste une baladodiffusion?
— Bien sûr. La baladodiffusion est un « mode de diffusion qui permet aux internautes, par l’entremise d’un abonnement à des fils RSS ou équivalents, d’automatiser le téléchargement de contenus audio ou vidéo, destinés à être transférés sur un baladeur numérique pour une écoute ou un visionnement ultérieurs ». En anglais, on dit podcast.
— Ah, d’accord, un podcast.
— Baladodiffusion est féminin, n’est-ce pas? On dit une baladodiffusion, comme on dit une diffusion?
— En effet.
— D’accord, alors j’ai une proposition. Je veux bien ajouter balado comme synonyme de baladodiffusion, mais à condition que balado soit masculin : un balado.
— Quoi?
— Ha! Ha! Quelle idée!
— LOL! Euh, c’est-à-dire : MDR!
— Mais pourquoi donc?
— Eh bien, vous connaissez le principe fondamental qui sous-tend notre travail : la langue française doit être complexe, difficile et rébarbative. Elle doit se défier autant que possible de toute logique. Je crois que nous avons là une belle occasion de mettre en pratique ce principe. Une baladodiffusion? Un balado.
— Hum, baladodiffusion est féminin, diffusion est féminin, balade est féminin. Votre proposition me semble difficilement défendable.
— La langue française n’a pas à être défendue. Elle existe, immémoriale, immortelle, impénétrable. Quelle serait notre utilité, s’il fallait simplement suivre la logique?
— C’est quand même préférable d’avoir un semblant d’explication.
— Attendez, j’ai une idée. On pourrait prétendre que le balado est en fait le fichier qu’on télécharge : un fichier, un balado.
— WTF?
— Ça me semble un peu tiré par les cheveux.
— Laissez-moi terminer. Le balado ne serait pas synonyme de baladodiffusion. La baladodiffusion serait le « mode de diffusion », tandis que le balado serait le fichier lui-même. Balado : « fichier au contenu audio ou vidéo qui, par l’entremise d’un abonnement au fil RSS, ou équivalent, auquel il est rattaché, est téléchargé automatiquement à l’aide d’un logiciel agrégateur et destiné à être transféré sur un baladeur numérique pour une écoute ou un visionnement ultérieurs ».
— My god!
— Ça ne correspond pas du tout à l’usage.
— En effet, tout le monde considère balado et baladodiffusion comme des synonymes.
— Tout cela me semble beaucoup trop technique.
— Chères consœurs, chers confrères, au risque de me répéter, plus c’est abscons, mieux c’est. J’aime bien l’idée voulant que l’abréviation n’ait pas le même sens que le mot d’origine. On atteint là, il me semble, un sommet dans l’art de la lexicographie!
— Vue sous cet angle.
— Pourquoi pas.
— C’est comme si auto n’avait pas le même sens qu’automobile! Ha! Ha!
— Malade!
— D’accord, mesdames, messieurs, la proposition est donc la suivante : nous intégrons balado comme concept distinct de baladodiffusion et en faisons un mot masculin. Quelqu’un pour seconder?
— J’appuie!
— Je seconde!
— J’appuie!
— Quel enthousiasme! Allez, le premier à seconder était Henri-Gonzague. Nous passons donc au vote. À main levée, qui est en faveur de la proposition? Voilà. La proposition est adoptée à l’unanimité. C’est ce qui met fin à la réunion du jour. Merci à tous.
— Ciao.
— Salut, gang.
— Bye.
— À plus.