4 juillet 2018

Passé simple (74) — Jeux

(Source: Wikipedia)



J’ai toujours trouvé niaiseuses les activités consistant à se lancer un truc : une balle de base-ball, un ballon de football, un frisbee. Ça ne m’empêchait pas de pratiquer à l’occasion ce genre de passe-temps avec un ami. Certains jeunes s’enrôlaient dans un club de base-ball ou de hockey. Pour ma part, j’ai développé très jeune une phobie des sports organisés : cela tient à la fois à mon manque de talent et à mon caractère introverti — tous ces enfants inconnus avec lesquels il fallait jouer! En plein été, avec les amis, on passait des après-midi dans une cave à jouer aux cartes (par exemple au trou de cul) ou à des jeux de société. C’était avant les jeux vidéo et les ordinateurs. Jouer impliquait souvent de se traîner par terre, à pousser des petites autos, à assembler des blocs LEGO, à pratiquer des sports inventés, dérivés du soccer ou du hockey : on usait en un rien de temps les genoux de nos pantalons de corduroy. À une époque, l’été, j’allais me baigner chez les jumeaux T***. On passait l’après-midi dans et autour de la piscine pendant que leur mère nous surveillait distraitement (bilan : aucune noyade). Je me rappelle que les jumeaux T*** possédaient un assortiment de figurines de Star Wars, qui furent mon premier contact avec l’univers de ce film-culte (non, je n’ai pas vu Star Wars à sa sortie, en 1977). Les jeux étaient parfois abstraits, des jeux de rôle improvisés consistant à s’inventer des histoires semblables à celles qu’on voyait à la télé; on se faisait des accroires, on changeait nos voix, on prenait l’accent des comédiens de doublage, ça finissait généralement en queue de poisson quand un ami moins porté sur l’art dramatique décrochait de son personnage. Enfant, il m’arrivait de m’ennuyer. On n’a vécu qu’une poignée d’années, on a l’univers entier à découvrir, mais on réussit malgré tout à se languir, on tourne dans la maison, on se plaint : « Je sais pas quoi faire ». Ça finissait par passer et je me retrouvais le nez dans une bande dessinée ou avec des crayons de couleur et du papier à dessiner des petits bonhommes ou devant la télé à regarder ce qui s’adonnait à y jouer; la bonne vieille télé, toujours là quand on a besoin de compagnie.