6 janvier 2018

Sans titre

Avec le vent, les traces de pas s’effacent derrière soi. On se retourne et on ne sait bientôt plus d’où on vient. Devant, il n’y a que du vide, un vide de long en large, alors on ne sait pas non plus où on s’en va. Je mets un pied devant l’autre, mais j’ai à peine l’impression d’avancer. L’horizon est si linéaire, si plat, si loin, il recule quand je progresse. Oui, bien sûr, cette image de l’horizon qui recule est un lieu commun, mais la prochaine fois que vous traverserez un désert, fixez l’horizon, faites dix pas, cent pas, mille pas, vous verrez bien par vous-même. Ici, où que vous soyez, vous avez toujours l’impression d’être au milieu du désert. Bien que je n’aie aucun but, je transporte sur mes épaules un lourd doute : je n’y arriverai pas. Ça semble évident en effet, on ne peut arriver quelque part que si on a un but. Si ça se trouve, je tourne en rond depuis tout ce temps.

Du ciel, on dit qu’à tout moment des milliers de satellites nous observent. Que voient ceux-là qui me survolent? Au milieu d’une étendue blanche sans fin, une vague tache sombre, peut-être n’est-ce là qu’une poussière dans l’objectif, une erreur du logiciel de compression des images, quoique si on le fixe assez longtemps, ce pixel gris pâle semble bouger imperceptiblement. Au fond, quelle importance, il ne s’agit au mieux que d’un point, un point infime dans un infini désert blanc. Les satellites ne s’intéressent pas à des choses aussi insignifiantes. Ils regardent sans doute ailleurs.

J’en suis à ce stade où je ne suis plus certain de rien. Suis-je en expédition? Suis-je un aventurier? Cet espace vide est-il un désert? On dit qu’on peut se parler à soi-même pour se donner du courage. J’ai pour mon dire que seuls les fous soliloquent. Je ne crois pas en être rendu là.

Perdu dans mes pensées, j’ai fait du sur-place trop longtemps. Je regarde autour. Que du blanc. Je lève les yeux au ciel : rien. Je vais m’arrêter un moment. Reprendre des forces. J’ai tout mon temps : je n’ai aucune destination et personne ne m’attend.