16 avril 2016

Oasis 33

[Jai une affection particulière pour ce texte. Ça tient à plusieurs choses: le récit, la rime, des images, des détails qui ne s’expliquent pas. Ainsi qu’à la musique qui accompagne le texte, bien sûr. On pourra dire que c’est très inspiré de Bashung et de ses paroliers; je ne le nierai pas. C’est aussi une histoire de rendez-vous manqué, comme la Madeleine de Brel. Ce texte colle avec quelques-uns des thèmes qui m’obsédaient alors et qui relient plusieurs des chansons de l’album de CQFD: le désert, le sable, la silice, le silicone, la ruée vers l’or(dinateur), l’informatique, la révolution numérique, la révolte qui couve (et les hauts et les bas de l’amour, bien sûr). En prime, le « Sarah! » du refrain est carrément repris d’une des toutes premières chansons des tchigaboux (si on peut appeler ça une chanson), à l’époque où on faisait semblant de savoir jouer de la musique dans des sous-sols de Saint-Hyacinthe ou des remises de Saint-Damase, une chanson-blague qui s’intitulait Johnny West et dans laquelle il y avait une certaine Sarah explicitement perdue dans le Sahara, ce qui était franchement moins second degré. Par hasard, Oasis 33 est la dernière chanson du dernier album sur lequel j’ai chanté: de Sarah à Sarah, la boucle était bouclée.]



Oasis 33


Aussitôt que je fus sorti du bagne
Je t’ai contactée, que tu me rejoignes
Dans le plus grand secret en cet endroit
Que l’on ne trouve sur aucune carte: Oasis 33

J’ai pu me joindre à quelque caravane
J’avais pas les moyens pour l’aéroplane
J’ai cher payé pour cette infortune
J’ai avalé des kilomètres de dune

J’y suis arrivé et je t’y ai attendu
J’ai désespéré que tu ne viennes plus
Et les jours qui se suivent et qui s’additionnent
Je regarde au loin, mais jamais personne

Ô sables émouvants témoins de ma détresse
Entendez-vous les plaintes que je vous adresse
J’écrase tristement ma dernière Camel
Dans ce cendrier sans fin et je t’appelle

        Sarah!
        Rendez-vous Oasis 33

Les chances de succès d’un cœur face au destin
Ou ça a tout ou ça a rien
Ça m’a rappelé ma mère, sa logique binaire
« Range ton souk, sinon pas de désert »

Mon amour, suis-je donc boit-sans-soif
En t’invitant ici aurais-je fait une gaffe
J’suis tanné d’attendre, tanné par le soleil
J’ai de la silice dans les oreilles

        Sarah!
        Rendez-vous Oasis 33

Aussitôt que je fus sorti du bagne
Je t’ai contactée, que tu me rejoignes
Mais tu m’as laissé sécher là
Moi pauvre gourde Oasis 33





Paroles: N. Guay
Musique: S. Caron, N. Guay
© 2002, CQFD