18 octobre 2012

La twittérature expliquée aux mamans

« Mais non, maman, c'est pas Facebook, c'est Twitter. C'est pour ça qu'on appelle ça la twittérature. C'est une espèce de jeu de mot avec Twitter et littérature. (…) Bin, Twitter, c'est un peu comme Facebook, mais on peut seulement publier des courts textes. De moins de 140 caractères. (…) Je t'ai tout expliqué ça, déjà. C'est parce que tu t'en rappelles pas. Je t'ai même montré comment aller voir ce que j'écris. C'est un peu compliqué à expliquer au téléphone. Je te montrerai de nouveau quand j'irai à la maison. (…) Non, non, c'est pas un roman, chaque texte est vraiment très court, quelques mots : une, deux, trois phrases, tout au plus. En fait, c'est plutôt des mots d'esprit, des aphorismes, des calembours. Des niaiseries, des fois, aussi. Disons que c'est comme les pages roses du dictionnaire Larousse, mais sur l'acide. (…) Non, j'ai dit sur l'acide, c'est une expression. En tout cas. On n'a rien inventé, des textes courts, ça existe depuis toujours. C'est juste que là, les gens doivent aller les lire dans Twitter. (…) Bin, oui, il semble bien qu'il y ait des gens qui me lisent, parce qu'à l'occasion, ils me retouittent. (…) Retouittent. Ça veut dire qu'ils rediffusent mes messages. Pour que d'autres les lisent. À chaque fois, c'est une petite tape dans le dos. Comme la cloche pour le chien de Pavlov. (…) Oui, Pavlov. Oublie ça, je me parlais. Tiens, je vais te donner un exemple pour que tu comprennes. L'autre jour, j'ai écrit : "La langue peut être soutenue, mais les idées insupportables". Pas pire, hein? (…) Bin, c'est une espèce de jeu de mot qui met en opposition soutenu et supportable. Soutenu, supporté, il y a comme un lien, tu vois? Ça dit aussi que quelqu'un peut parler bien, utiliser une langue soutenue, mais dire des choses terribles, insupportables. Bon. C'est sûr que c'est moins drôle quand il faut l'expliquer. (…) Ha! Ha! Ha! Pour ça, il n'y a pas de danger : ça ne rapporte pas une cenne! Inquiète-toi pas, je ne démissionnerai pas de ma job pour touitter à temps plein! (…) Hm. Écoute, maman, je vois bien que tu trouves ça épais, mais moi, ça m'amuse. Ça me permet de mettre par écrit des idées qui me passent pas la tête et que sinon j'oublierais. Ça prolonge le petit frisson de l'idée qui naît par l'espoir d'être lu. Et puis, il y a le défi d'écrire quelque chose avec peu de mots. (…) En tout cas. Dans le fond, je te demande pas de comprendre, maman. Dis-toi que c'est pas très différent que d'écrire des poèmes ou des petites histoires. Ou même des blagues, tiens. Les blagues que matante Gaétane t'envoie à tous les jours que le bon dieu amène, il faut bien que quelqu'un les écrive, non? Les maximes, les bons mots, les jokes de blonde, le texte des cartes de souhaits vendues à la pharmacie, tout ça, il y a bien du monde en quelque part qui les a écrits! Bin, c'est ça que je fais, au fond : j'écris des petits textes de ce genre-là. Pour moi. Pis pour mes quelques abonnés. Pis, pourquoi pas, pour la postérité, en supposant qu'elle en a quelque chose à foutre. (…) On ne dit pas des amis, dans Twitter, on dit des abonnés ou des suiveux. (…) Mais non, maman, je te l'ai dit, c'est pas Facebook, c'est Twitter… »