
Se mettre au gris. Au noir et blanc. Taire les teintes. Liquéfier le paysage. Le rendre tragique. Impur. Ces longueurs d’ondes. Celles du bruit blanc, presque. Celles qui assourdissent les choses. Les laisser faire. Se taire. Se fermer. Se fondre. Considérer l’écart, ces quelques degrés qui séparent le solide du liquide, le blanc du gris. La différence qui fait et défait la normalité des choses. Il n’y a plus de saison. Il n’y a jamais eu de saison, en fait. C’est soit trop normal ou trop divergent. C’est toujours trop. On campe dans l’écart-type. Ces tiraillements nous marquent, font partie de nous. Mais ces degrés-là, on les perçoit à peine. La vie est trop courte pour apprécier l’évolution du climat, le mouvement des plaques tectoniques, l’abâtardissement de l’humanité. Ces nuances nous échappent. Le temps nous échappe. File. Fuit. Alors, attendre. Fermer un œil. Ou fermer l’autre. Aplatir le paysage. Le laminer. L’aplanir. Voir moins loin. Voir moins large. Se recentrer. Aller à l’essentiel. Enfin, devenir moins productif. Exister plus, peut-être. Écrire des mots. Fonder un univers. Sans raison. Pour soi. Inutile. Anonyme. Subir l’hiver. Provoquer un printemps.
