7 août 2010

Instantanés

La patience du fleuve
Un navire avance imperceptiblement
Traversera bientôt le paysage

* * *

Le carillon tinte mollement
Dans la brise
Gâchant le silence

* * *

Comme des vagues se cassant sur la grève
Par intermittence
Le bruit des voitures qui passent sur la route, derrière

* * *

Cette odeur âcre de pétrole et d’acier
Nous atteignons le chemin de fer
Qui longe la rive, en bas de la falaise

* * *

Toute une variété de petits fruits sauvages
Merises, pommettes, raisins, framboises
Mais bizarrement aucun oiseau en vue

* * *

Si ce n’était de la silhouette des montagnes sur l’horizon
Le ciel et le fleuve se confondraient
D’un même bleu très pâle

* * *

Dans le village, les touristes se massent
Rue principale et galeries d’art prises d’assaut
Il fait bon ici un verre de blanc sur la terrasse

* * *

Il faut faire un effort pour se le rappeler
C’est le même fleuve, c’est le même pays
D’ici, Montréal semble étranger

* * *

Il anticipe ses manœuvres des kilomètres à l’avance
Son bâtiment semble à peine se déplacer
Le pilote de navire se la coule-t-il douce?

* * *

Le l’aube au crépuscule
Le paysage se peint de nouvelles nuances
De même, jour après jour

* * *

D’ici on voit la pointe de l’Isle-aux-Coudres
L’Isle-aux-Coudres
Difficile de ne pas se laisser aller à des calembours idiots

* * *

Comme la silhouette d’une femme allongée
La courbe dramatique de la hanche d’une femme
La côte charlevoisienne plonge dans le fleuve

* * *

Cette teinte de bleu très pâle
Est-ce le ciel qui se mire dans le fleuve
Est-ce l’inverse?

* * *

Tous les paysages ont quelque chose d’unique
Certains bénéficient d’un marketing plus efficace
Ainsi Charlevoix

* * *

Ce matin, l’horizon a disparu
On aperçoit l’ombre de navires fantômes
Le ciel a la couleur du lait

* * *

Mille bourdons besogneux butinent, les cuisses chargées de pollen
Ça n’arrête pas de la journée
Vivent les vacances

* * *

Farniente
Le temps ne passe pas, il glisse
Sans bruit

* * *

« Quel gâchis », me dis-je
 Je reste un moment interdit
Devant la vitrine de cette galerie d’art

* * *

Ce matin, on nous a volé le paysage
Brume opaque
Plus d’île, plus d’horizon, plus de ciel

* * *

Plus rien à voir, que du blanc
Un silence chargé
Soudain tonne une corne de brume

* * *

Farniente
Les pieds plus hauts que la tête
Rêver les yeux ouverts

* * *

Ciel variable, temps suspendu
J’égrène les pages d’un roman
Le vent chasse les brumes, mais charrie l’orage

* * *

À marée basse, la baie se vide
De gros rochers se découvrent
À la plage, des enfants jouent dans la boue

* * *

Tiens, je ne suis plus dans l’ombre
Le soleil m’a rejoint sans que je m’en rende compte
Je déplace ma chaise et replonge dans ma lecture

* * *

Le temps a beau avoir l’air suspendu
Un spectre hante l’après-midi
Demain, c’est retour en ville

* * *

L’ombre des nuages sur l’eau verte de la baie
De gros cumulus glissent
Tels des navires volants

* * *

Une bourrasque de vent dans les feuilles
Encore et toujours le carillon sous la véranda
Une corneille croasse, tout près

* * *

Farniente
Toute la journée à ne rien faire
Conjurer le stress de la routine par la monotonie


Baie-Saint-Paul, août 2010