26 octobre 2009

Euro-viro-sceptiques

Le graphique qui suit compare l’intérêt pour le mot-clé « H1N1 » au Canada et en France depuis le début de l’année. On voit clairement que pendant qu’au Canada la fameuse grippe A (H1N1) (puisque tel est son nom pas très sexy) cartonne, en France, on s’en fout royalement. Selon les échos que je perçois d’ici, il semble que la majorité des Français prend cette grippe soit comme une grosse exagération, soit comme un obscur complot (impliquant notamment les méchantes multinationales pharmaceutiques).



Source : Google Trends. La requête suivante en date d’aujourd’hui : http://www.google.com/insights/search/#q=H1N1&geo=CA%2CFR&date=1%2F2009%2012m&cmpt=geo


Bien entendu, il y a aussi des sceptiques en nos contrées. Et tout ce scepticisme me laisse songeur. Je ne doute pas un instant que la prévention en santé publique soit difficile à communiquer à une population. Ça repose en effet sur des concepts subtils, comme les probabilités et la de gestion de risque, qui sont difficile à saisir pour monsieur-madame-tout-le-monde. Il faut dire que la folie sécuritaire qui a fait suite aux attentats états-uniens de septembre 2001 a eu le don de faire tiquer quiconque a un esprit critique moindrement acéré. Cela et la guerre en Iraq, entre autres, auront avivé chez le badaud moindrement paranoïaque la propension aux théories du complot. Voilà donc qu’avec le H1N1, toutes les organisations de santé publique du monde se seraient liguées pour nous monter l’arnaque du siècle (de collusion avec les méchantes multinationales pharmaceutiques, of course).

En guise de démonstration, certains sceptiques n’hésitent pas à nous servir l’exemple du bogue de l’an 2000, ce qui a le don de m’énerver. À ceux-là j’aimerais répondre : comment peut-on inclure dans la même théorie du complot le fait que (a) il n’y a eu que peu de problèmes techniques en janvier 2001 et que donc il n’y avait pas de bogue et c’était un faux problème et (b) des centaines de milliers de programmeurs à travers le monde ont fait semblant de corriger des bogues pendant la dernière moitié des années 1990 ? Parce qu’en effet, une fois tout le monde vacciné contre la grippe A (H1N1), on ne pourra plus démontrer que si on n’avait rien fait, c’eût été la catastrophe. N’est-ce pas là la conséquence d’une mesure de prévention ?

Si cette grippe A (H1N1)  je ne m’habituerai jamais à ce nom  causait des symptômes telles que des lésions cutanées sévères, des bubons, la gangrène, la confusion, la production effrénée de salive, les yeux globuleux, des tremblements pouvant aller jusqu’aux convulsions et caetera, il n’aurait suffit que de quelques cas pour que les centres de vaccination soient pris d’assaut par la population.

Tiens, il me semble qu’il y aurait un amusant scénario de film d’horreur à tirer de cette histoire. Un virus mystérieux transforme les humains en zombies. Suite à quelques cas isolés, par chance, on réussit à mettre au point un vaccin efficace contre ce virus zombifiant. Une campagne de vaccination mondiale est immédiatement mise sur pied. Mais en France, la population n’y croit pas : la majorité des cas sont répertoriés dans des pays d’Afrique sub-saharienne, le taux de mortalité ne semble pas à première vue très élevé. Les Français euro-viro-sceptiques refusent donc le vaccin, y voyant un obscur complot ourdit par les méchantes multinationales pharmaceutiques. S’ensuit un film bien sanglant où les Français de toutes les régions se transforment en zombies sanguinaires !

(Excusez-la.)