3 juin 2009

Clichés

Il y a de ces scènes qui apparaissent dans un nombre incalculable de films américains. Elles ont le don de provoquer chez moi un réflexe irrépressible : mon pouce presse instantanément le bouton de la télécommande permettant de passer à la prochaine chaîne. Lorsque je suis au cinéma et qu'une telle scène survient, je suis coincé: pendant que je soupire et hoche la tête négativement de dépit, mon pouce s'agite inutilement dans l'air, tentant d'actionner une télécommande invisible. Je dois alors prendre mon mal en patience le temps que la séquence en question arrive à son terme et que l'action se poursuive.

De quoi est-il question ici? Voici quelques exemples des lieux communs cinématographiques qui causent en moi malaise et ennui:

  • Dans une comédie grand public, le personnage bouffon boit un breuvage goulûment, puis émet un gros rot sonore. Cette scène apparaît notamment dans tous les longs métrages de dessins animés américains réalisés depuis dix ans. On dit que ces films sont pour toute la famille? Merde, me dis-je, je n'ai plus cinq ans, et je change de poste.
  • Dans les films d'action, on n'hésite jamais à nous servir l'inévitable coup du compte à rebours, ce vieux truc forçant un suspense paroxysmique. Je ne verrai jamais le héros réussir l'impossible mission avant que le chrono n'atteigne le zéro: déjà je regarde quelqu'autre niaiserie ailleurs.
  • Comédie dramatique. Deux personnages dans une voiture. Ils roulent et discutent un moment. Une chanson pop d'antan se met à jouer à la radio. Les deux personnages entonnent en choeur la chanson, on espère que ça va durer dix secondes, mais non, il faut se taper tous les couplets et ça dure plus de trois minutes. C'est sensé susciter chez le spectateur un sentiment de bonheur. Je grommelle et m'écrie « Ah, non, pas encore! » en changeant de chaîne.
  • Une jeune femme soudain seule dans la vie (son mari étant mort récemment dans un accident), déménage dans une petite bourgade, achète pour une bouchée de pain une immense maison victorienne de 2 étages totalement délabrée. Sur des airs pop rock d'antan, la jeune femme rénove la résidence de fond en comble, toute seule, en un week-end. Je n'attends surtout pas qu'apparaisse le prince charmant sur le pas de la porte du château (ce qui survient généralement dans les cinq minutes suivantes) et, les dents serrées, je presse le bouton pour passer à la chaîne suivante.
  • Des stepettes de kung-fu? Des super-héros? Je zappe!
  • Le scénario de la vengeance: Le héro subi une humiliation suprême et/ou une agression barbare pendant les trente premières minutes du film et passe ensuite une heure à traquer le méchant pour enfin lui régler son compte en lui faisant subir les pires atrocités. Le spectateur est sensé ressentir un petit frisson de joie sadique d’extrême-droite, mais depuis longtemps je suis passé à autre chose en me pinçant le nez.


Tout ceci étant dit, je ne suis pas dogmatique et il est parfois agréable d'apprécier le divertissement débile que peut apporter un film hollywoodien grand public. Certains lieux communs me sont étrangement (et arbitrairement) acceptables. Un exemple:

  • Le scénario "Ils ne pouvaient pas s'aimer": une superbe fille et un beau mec se tournent autour pendant la majeure partie du film. Comme spectateur, on voudrait qu'ils se tombent dans les bras, mais rien à faire: un antagonisme naturel, une différence de statut social, la distance géographique, des fiançailles avec un autres personnages ou diverses autres considérations les empêchent de s'aimer. Bien entendu, le scénario fera en sorte que, dix minutes avant la fin du film, nos anti-tourtereaux finissent par se rapprocher, laissent tomber leurs défenses et  deviennent les amants que nous espérions qu'ils soient depuis quatre-vingt-dix minutes. Ils s’embrassent, puis le générique apparaît, sur un vieux succès d’antan.


D’accord, j'avoue: bien que je sois un peu grincheux, j'ai quand même un petit fond romantique.